Ces plateformes qui protègent l'innovation et les secrets industriels
Qu'il s'agisse de gérer un portefeuille de brevets, de surveiller les tendances technologiques ou d'organiser l'open innovation, ces applications viennent piloter et sécuriser les stratégies de R&D d'entreprise.
La pandémie de la Covid-19 aura ravivé le débat sur la propriété intellectuelle et l'accès aux vaccins. Faut-il lever les brevets déposés ou au contraire les renforcer afin de favoriser l'innovation à l'origine desdits vaccins ? Au-delà de cet enjeu conjoncturel, la propriété intellectuelle tient un rôle accru dans une économie mondiale de plus en plus influencée par les progrès technologiques. La crise sanitaire et économique n'a d'ailleurs pas diminué le nombre de dépôts de brevets internationaux. Il a même enregistré un nouveau record en 2020 avec 275 900 demandes, en hausse de 4% selon l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (Ompi).
Exigeant de suivre un processus très formalisé, la gestion de la propriété intellectuelle est chronophage. C'est là qu'interviennent les plateformes logicielles de gestion de la propriété intellectuelle. Elles permettent de gérer un portefeuille de brevets en prenant des décisions en fonction de l'environnement concurrentiel : investissements dans de nouveaux brevets, cessions... Ce marché applicatif devrait enregistrer une croissance moyenne annuelle de plus de 13,54% au cours de la période 2021-2026 selon une étude de Research and Markets. Panorama de ses principaux acteurs.
Questel, le doyen
Questel est une véritable institution sur le terrain de la gestion de la propriété intellectuelle. Créée en 1978 sous le nom de Télésystèmes, cette ancienne filiale de France Télécom s'est émancipée de l'opérateur historique pour devenir un éditeur indépendant. Elle revendique plus de 20 000 clients et un million et demi d'utilisateurs dans 30 pays. Employant 1 200 salariés, la société, dont le siège social est basé à Paris, a élargi au fil des années son périmètre fonctionnel. Son offre qui comprend une douzaine de modules repose sur Orbit, une technologie américaine concurrente rachetée en 1994.
Orbit : une solution complétée par une offre de conseil
Module phare de l'offre, Orbit Intelligence se présente comme un logiciel de business intelligence dédié à la recherche et à l'analyse des brevets à l'échelle mondiale. Sa base de données regroupe des centaines de millions de brevets, de dessins et modèles et autres essais cliniques, projets et documents scientifiques. Autre composant clé, Orbit Asset est dédié à la gestion de portefeuille d'actifs intellectuels, automatisant les renouvellements et facilitant la prise de décision stratégique.
En 2020, Questel a lancé pas moins de trois nouveaux modules dont une plateforme collaborative pour centraliser la veille technologique (Orbit Tech) et un outil d'horodatage et de protection basé sur la blockchain (Orbit Blockchain). Sa feuille de route R&D est aussi alimentée par une politique active de croissance externe initiée depuis 2015. Participant à la consolidation du secteur, Questel a racheté, cette année, doeLEGAL, un logiciel américain de gestion juridique des entreprises, et Innosabi, un logiciel allemand de gestion de l'innovation. Le groupe a surtout mis la main en mars sur NovumIP. Issue du rapprochement de deux cabinets de conseil en propriété intellectuelle, Novagraaf et Pavis, cette société édite une solution de gestion d'actifs et s'appuie sur un réseau de 380 experts dans le monde.
PatSnap, la licorne qui mise sur l'IA
Le marché de la gestion de la propriété intellectuelle a sa licorne. En mars 2021, PatSnap a levé 300 millions de dollars auprès d'un groupe d'investisseurs mené par le japonais SoftBank et le chinois Tencent, valorisant cet éditeur singapourien au-delà du milliard. Fondé en 2017, il fait appel à l'intelligence artificielle pour passer au peigne fin la littérature scientifique, les fusions-acquisitions, les litiges juridiques, les licences et, bien sûr, les demandes de brevets.
Sa plateforme couvre 116 juridictions et analyse 140 millions de brevets et plus de 250 millions de points de données d'innovation dans le monde. La promesse de PatSnap ? Transformer ces données en informations exploitables. Pour cela, la solution fait la part belle à la datavisualisation. Elle propose différents diagrammes mais aussi des cartes de points chauds (heatmap) pour représenter visuellement l'état de l'art des innovations. Au-delà de cette offre générique, PatSnap édite des solutions spécifiquement dédiées aux acteurs de la chimie et des biotechs. Employant 700 salariés dont 250 en R&D, PatSnap revendique plus de 10 000 clients, dont Disney, la Nasa, Spotify et Tesla.
Clarivate, éditeur de publications scientifiques
Cotée à la bourse de New York, Clarivate emploie plus de 8 500 collaborateurs répartis dans plus de 40 pays. La société détient et gère un grand nombre de publications scientifiques comme Web of Science, Publons, EndNote, ScholarOne et Journal Citation Reports (JCR). Riche de ces contenus, Clarivate propose des outils et des services autour de la recherche universitaire et scientifique, l'analyse des brevets et des normes réglementaires, la protection des marques ou la gestion de la propriété intellectuelle. Son offre comprend de nombreux modules pour surveiller les tendances technologiques et le paysage concurrentiel puis gérer en conséquence un portefeuille de brevets et de marques. Elle pilote notamment le FTO (pour freedom to operate) qui consiste à s'assurer qu'une activité n'enfreint pas un droit de propriété industrielle.
Particulièrement présent dans le monde de la santé, Clarivate distribue des solutions spécifiquement dédiées aux acteurs des medtech et de la biopharma. Il compte notamment parmi ses références le laboratoire pharmaceutique français Pierre Fabre. En mai dernier, le groupe a annoncé vouloir acquérir la ProQuest pour quelque 5,3 milliards de dollars. Cet acteur américain commercialise un grand nombre de bases de données scientifiques couvrant mémoires, thèses, et autres publications de recherche. L'opération devrait être bouclée dans le courant du troisième trimestre.
Humanperf mise sur l'innovation participative
Créé en 2004, le français Humanperf édite une plateforme logicielle (baptisée IDhall) qui couvre tout le cycle de vue d'un projet d'innovation, de la phase de conception à la mise en œuvre. Multilingue, IDhall fait la part belle à l'idéation participative. Une entreprise peut créer un workflow personnalisé où toute nouvelle proposition est automatiquement envoyée à un expert pour approbation. La plateforme permet, dans un esprit de gamification, d'attribuer des points et des badges en fonction des actions menées ou de mettre en valeur des initiatives remarquables.
Soutenu à ses débuts par Bpifrance, Hodéfi et Réseau Entreprendre Nord, Humanperf compte des entreprises de toute taille parmi ses références clients dont Air France, Auchan, Caisse d'Epargne, Colas, Generali, Safran, Total ou Upsa. Sa solution est commercialisée en mode SaaS ou on-premise, sous forme de licence, d'abonnement ou de forfait.
Startup Flow, pour gérer l'open innovation
Autre éditeur français, Startup Flow propose une plateforme centrée sur l'open innovation. Une solution en mode SaaS qui permet de cartographier et de surveiller un écosystème de start-up, de partenaires, de fonds d'investissement ou de centres de recherche académiques. Elle s'adresse aux grandes organisations qui explorent de nouveaux modèles économiques en associant équipes d'innovation internes et jeunes pousses ou spécialistes en capital-risque.
Startup Flow revendique plus 20 000 utilisateurs dans 42 pays et plus de 4 000 projets lancés par ses clients. L'éditeur parisien affiche une cinquantaine de grands groupes parmi ses références client, dont Axa, Capgemini, Carrefour, Bayer, HSBC, JC Decaux, Michelin, Nestlé, Orange, Renault, SNCF et Société Générale.