Le rôle déterminant des technologies dans la démocratisation culturelle
Les personnes en situation de handicap étaient 52% à indiquer en 2022 avoir difficilement accès la culture. Une solution pour les inclure réside dans l'utilisation des nouvelles technologies.
Bien que la France se positionne comme l’une des nations emblématiques de la culture sur la scène internationale, une partie de la population est mise de côté. Les personnes en situation de handicap étaient 52 %[1] à indiquer en 2022 avoir difficilement accès la culture. Comment alors maintenir ce statut de géant de la culture, tout en incluant les personnes nécessitant une accessibilité spécifique ? L’une des solutions réside dans l’utilisation des nouvelles technologies. Que cela soit pour les personnes souffrant d’un handicap (incapacité à se déplacer ou bien à apprécier une œuvre ou un spectacle sans vue ou audition), les jeunes publics ou les publics étrangers, elles offrent de nouvelles perspectives, plus inclusives, qui reconnectent plus largement les citoyens à la culture.
L’accessibilité va au-delà de l’accès physique
Lorsque l’on parle d’accessibilité à la culture, il n’est pas rare de penser à l’accès physique aux lieux culturels, tant le sujet est au cœur des débats depuis plusieurs années. Le président Emmanuel Macron s’engageait d’ailleurs en 2017 à faciliter l’accès à la culture pour tous. D’ailleurs, des progrès sont à signaler, puisque 48 % des répondants s’accordent à dire que l’accès a été facilité entre 2017 et 2022, d’après le baromètre « Handicap et Culture ». Mais la question de l’accessibilité va plus loin.
Un grand nombre d’œuvres (musicales, théâtrales, picturales) demeurent souvent « inadaptés » aux différents profils de handicap, même si de nombreuses institutions et associations se sont emparées de la question. Citons le prix « Patrimoines pour Tous », initié par le Ministère de la Culture dès 2007 pour primer les établissements culturels mettant en place des dispositifs favorisant l’inclusion. Autres exemples : les sessions de sensibilisation par le toucher pour les malvoyants au musée du Louvre, les collectifs de guides-bénévoles à La Rochelle ou bien encore l’association Accès Culture qui met en place des services d'accessibilité au spectacle vivant dans plus de 100 sites en France pour les personnes aveugles, malvoyantes, sourdes ou malentendantes.
Réduire la fracture culturelle avec la technologie
Les nouvelles technologies sont l’un des leviers de la réponse à l’accessibilité de l’objet culturel. Les exemples d’utilisation du numérique au service des publics handicapés sont de plus en plus nombreux et les acteurs de la culture qui portent haut et fort leurs bénéfices se multiplient. La Philharmonie de Paris par exemple, a initié une collaboration avec la société SoundX à destination des sourds et malentendants. Pour leur permettre d’accéder à la musique, ils s’appuient sur une intelligence artificielle qui transforme les données audios en vibrations avant de les transmettre au corps via un « pack vibrant », à porter sur soi pour ressentir les rythmiques. D’autres expériences, impliquant la réalité virtuelle et la réalité augmentée se multiplient aussi, pour donner à vivre la culture sous toutes ses formes, en intégrant des logiciels de sur-titrage en temps réel via le topage pour permettre à des spectateurs sourds ou malentendants d’assister à des pièces de théâtre ou des opéras comme l’a fait le théâtre du Châtelet avec la solution de la société Panthea par exemple.
Ce sujet de l’accessibilité va au-delà même des personnes en situation de handicap : les étrangers visitant la France apprécient aussi ces efforts qui leur permettent de profiter de représentations théâtrales ou de visites guidées dans leur langue. Sans oublier les publics francophones assistant à des représentations d’opéra, le plus souvent en italien ou en allemand. La question de l’attractivité de la culture est très fortement corrélée à celle de son accessibilité et de son appréhension par tous les publics. Il est temps de favoriser l’inclusivité aux différents milieux sociaux et indépendamment des distances géographiques ou des contraintes temporelles.
Raviver la relation des lieux culturels avec leurs publics
Réduire la fracture culturelle, économique et d’inclusion de la culture est un enjeu prioritaire pour la pérennité de ses institutions. A l’heure où la création se développe et s’enrichit par les technologies, comme en musique ou dans la conception d’œuvres d’art, pourquoi la visite physique, l’expérience vécue ne serait-elle pas aussi augmentée ? En offrant un concept neuf ou une meilleure immersion, les nouvelles technologies donnent une nouvelle dimension aux projets artistiques et permettent de donner un nouveau souffle aux visites classiques. Il est par exemple déjà possible de revivre comme si on y était des scènes de l’histoire à la citadelle sous-terraine de Verdun avec des lunettes de réalité augmentée, ou de bénéficier d’une expérience multi-sensorielle sur le site d’Alésia. Les entreprises créant ce type d’expérience sont aujourd’hui encore peu nombreuses mais plusieurs initiatives, à l’instar de l’appel à projet de BPI France qui vise à développer la production et la diffusion d’expériences immersives pourrait encourager leur démocratisation.
Les nouvelles technologies ont un rôle clé de « boosters » du secteur de la culture, aussi bien en matière d’accessibilité face au handicap qu’en termes d’ouverture à tous les publics en offrant une nouvelle approche de la création, de l’appréciation et de l’expérience culturelle elle-même. L’adaptation de l’expérience à tous, comme la « satisfaction » du public seront deux enjeux cruciaux auxquels la culture traditionnelle devra se consacrer pour se pérenniser et encourager le développement de nouveaux formats culturels.
[1] Etude Malakoff-Humanis « Handicap et Culture », publiée en février 2023