La révolution des données de transport est en marche
L'explosion démographique et l'étalement urbain vont profondément changer la façon dont les humains se déplacent. Il devient essentiel de repenser dès aujourd’hui la gestion de la mobilité urbaine par une approche centrée sur la donnée.
Du retard des transports en commun à la congestion automobile, en passant par la pollution de l’air… les maux de la mobilité urbaine se manifestent au quotidien dans les grandes métropoles. Ils résultent pour l’essentiel d’un déséquilibre entre les besoins de déplacement de la population et les moyens de transport mis à sa disposition à un moment et en un point donnés. Comment cela se traduit-il ? Force est de constater qu’à certaines heures de la journée, le maillage des transports en commun (malgré la multiplication et la diversification des infrastructures ces dernières années) n’est plus suffisant. À contrario, le rapport de force s’inverse aux heures creuses et l’offre devient largement supérieure aux besoins.
À ce moment de notre réflexion, la tentation est grande de privilégier les usagers, et de demander toujours plus d’équipements aux collectivités et aux opérateurs de transport. Mais les ressources sont limitées. Changeons notre fusil d’épaule et demandons-nous plutôt comment optimiser la gestion de la mobilité urbaine. Pour cela, la donnée joue un rôle fondamental.
L’exemple de Bogota
Aujourd’hui, nous consommons et produisons de la donnée tout le temps et partout. Cet or noir coule à flot, et la technologie permet de le raffiner. La collecte, le partage et l’analyse de ces volumes astronomiques de données peuvent offrir une vision complète de la mobilité urbaine et des tendances fortes qui se dessinent, et aiguiller la prise de décisions en temps réel.
Pour bien comprendre ce que le partage de données peut apporter à la mobilité dans nos villes, observons le projet Movilidata. Pendant 5 mois, quatre étudiants du Master "Governing the Large Metropolis" de Sciences Po se sont penchés sur les problèmes de transport rencontrés par la ville de Bogota et ses résidents. Et ces difficultés ne sont pas des moindres, puisque la capitale colombienne est la 2e ville qui compte le plus d’embouteillages en Amérique Latine et la 7e dans le monde.
Grâce à la collecte et au croisement de plus de 60 jeux de données récupérés en open data ou auprès de la ville elle-même, les étudiants ont lancé un observatoire complet de la mobilité bogotaine. Ils ont construit un tableau de bord révélant la nature, les causes et les conséquences directes de problèmes aussi inquiétants que la forte concentration de microparticules dans l’air et le nombre extrêmement élevé d’accidents mortels en deux-roues. Le diagnostic a permis de constituer un kit de solutions dont la métropole et ses partenaires peuvent désormais s’inspirer pour lutter contre les effets néfastes provoqués par la circulation des biens et des personnes.
Nouveaux paradigmes
Qui n’a jamais connu “la souffrance” du stationnement dans une grande ville ? Aujourd’hui, parce qu’ils partagent leurs données en temps réel, des acteurs du stationnement rendent possible l’enrichissement d’applications qui indiquent aux automobilistes, aux motards et aux personnes à mobilité réduite la localisation de LA place encore libre dans la rue ou le parking le plus proche. Finies les innombrables allées et venues dans le quartier à l'affût du moindre espace disponible.
Autre cas d’usage : plusieurs métropoles françaises croisent les données de leurs capteurs de trafic à des signalements d’incidents ou d’embouteillages remontés par les automobilistes. Cette base informationnelle leur permet de diminuer significativement la congestion des routes et plus généralement d’améliorer la prise de décision en matière de politique urbaine.
La révolution des données de transport est en marche et nous ne mesurons pas encore l’entièreté des opportunités qu’elle porte avec elle. Ce qui est sûr en revanche, c’est qu’elle dessine au trait fin les contours du citadin et de la ville de demain.