De nouvelles bases pour les relations économiques franco-algériennes
Malgré un passif lourd, les relations humaines et économiques entre la France et l'Algérie ont toujours été au plus haut niveau. L'avenir de la France et de l'Europe se fera en renforçant les partenariats économiques avec le sud de la Méditerranée.
Les relations entre l’Algérie et la France ont été ponctuées de passions, de souvenirs douloureux, mais aussi de liens humains tissés au fil des ans par les Algériens venant s’installer dans l’Hexagone pour y travailler ou fonder une famille. Certains d’entre eux sont binationaux, la plupart ont eu des enfants et même des petits enfants. Les entrepreneurs algériens se sont adressés aux PME françaises à hauteur de 80% pour leurs approvisionnements en biens intermédiaires, biens d’équipement, biens semi-finis et biens de consommations ainsi que pour importer les véhicules et les produits électroménagers. Ces « petits contrats » qui faisaient de la France le premier fournisseur de l’Algérie avec des parts de marché dépassant les 28% ont été facilités par la proximité géographique, la facilité linguistique, les flux humains dans les deux sens. Ils furent à l’origine de flux financiers sur le marché parallèle des devises. J’ai été témoin depuis 1986 de ces relations où l’importateur algérien pouvait aller chercher des devises dans des cafés et restaurants parisiens et plus généralement hexagonaux tenus par des nationaux dont les proches recevaient l’équivalent en dinars avec un bonus pouvant atteindre 4 fois le taux officiel. Les importations par les cabas et les achats de véhicules ont laissé place à un système mieux organisé et plus industrialisé.
Par contre les négociations des gros contrats dans un pays dominé par le secteur public sont l’apanage de négociations de haut niveau. La barrière linguistique et la disponibilité financière ne sont pas un critère de choix mais ce sont d’autres intérêts qui priment, particuliers ou géostratégiques.
La présence française était forte jusqu’à 2012. Les centaines d’entreprises exposant sous pavillon français sur des milliers de mètres carrés ont cessé leurs échanges ou sous une forme confidentielle, dans les aéroports ou à Paris.
L’association AMIE (dont j’étais le directeur) et Ville de Montreuil étaient les seuls exposant étrangers à la Foire d’Alger dans les années 1990.
Nous avions développé le concept de partenariat et de coopérations mutuellement avantageuses entre les sociétés de notre région et leurs homologues algériens. Plusieurs PME ont crée des joint venture. Parmi les sociétés que nous avions accompagnées, je peux citer Go Fast devenu Aigle Azur, Sofresid, Saint Gobain, Quinette Gallay, CR2J, Procédés Hallier, Aucouturier…
Je me permets ce détour historique pour rappeler que l’avenir des relations Algéro-Françaises doit aller dans le sens que nous avions imaginé ; des co-productions mutuellement avantageuses et durables avec transferts de technologies et de savoir-faire. J’ai défendu l’idée que la sortie de crise de l’Europe passera par de nouveaux rapports avec le sud de la méditerranée. L’Allemagne s’est appuyée sur les pays de l’est européen comme base de sous-traitance industrielle et d’investissements productif en même temps qu’elle a pu écouler ses biens d’équipement et ses produits de consommation. C’est du gagnant gagnant.
La France ne doit pas considérer les pays du Maghreb comme des concurrents potentiels mais comme des partenaires dont le niveau de développement est un facteur d’élargissement des marchés et de création de nouvelles richesses.
A la fin des années 1980 et dans les années 1990, nous avions défendu auprès des parlementaires français le contrat gazier plus favorable à l’Algérie et la contestation de la mauvaise notation de la Coface. Ce faisant, nous pensions aussi aux entreprises de nos régions et à l’avenir des relations commerciales franco-algériennes.
Il est regrettable que les grands groupes français aient pris des précautions sécuritaires trop draconiennes dans les années 1990.
L’Algérie de son côté doit abroger le dispositif 51/49 et impulser une ouverture sur les investissements étrangers, réformer son secteur bancaire, améliorer la gouvernance et le management des organisations, diversifier son économie, s’appuyer sur sa diaspora et faciliter le retour des talents, relever la productivité et appliquer une politique de formation axée sur les technologies et la technique.
Je ne peux oublier la dimension maghrébine qui ferait de l’Algérie une composante essentielle d’un grand marché de 85 millions d’habitants et d'un PIB de 380 Mds €.
Seule une communauté économique maghrébine pourrait négocier en position de force avec les pays européens et attirer massivement leurs capitaux.