Vladivostok, nouveau front russe pour séduire l'Asie
La Russie multiplie les investissements pour faire de cette ville de l'Extrême-Orient un pôle touristique et industriel à destination des Chinois.
A 9 000 km à l'est de Moscou et 2 000 km au nord de Pékin, Vladivostok était jusqu'ici surtout connu comme le terminus du Transsibérien, le mythique chemin de fer reliant la capitale russe à l'Extrême-Orient russe. Longtemps base de la marine soviétique, elle a été interdite d'accès aux étrangers jusqu'en 1992. Depuis, presque ou rien n'y a été fait, jusqu'à aujourd'hui : le gouvernement russe juge désormais la zone stratégique pour développer les relations commerciales avec ses voisins asiatiques (Chine, Japon, Corée...).
Signe des temps : c'est à Vladivostok que s'est tenu en septembre 2012 le dernier Forum de coopération économique Asie-Pacifique (Apec). Et un programme d'investissement de 670 milliards de roubles (16,5 milliards d'euros) a été lancé en 2007 pour faire de la cité une vitrine de la puissance russe.
En juin 2012, le pont avec la plus longue portée haubanée au monde (1 104 mètres) a été inauguré entre le continent et l'île Rousski. Cet ouvrage, dont les haubans ont été fournis par le français Freysinnet, a coûté la bagatelle de 850 millions d'euros. Trois autres ponts ont été récemment achevés ou sont programmés dans la péninsule.
Au total, une quarantaine de projets devraient voir le jour d'ici 2020 : un centre de conférence, un complexe sportif de sports d'hiver, des hôtels de luxe, le campus universitaire de l'Université fédérale d'Extrême-Orient, un océanorium, une salle d'opéra de 1 500 places ou un hôpital de pointe.
Pour désenclaver la ville, dont les routes goudronnées sont dans un piteux état, d'énormes moyens ont été dégagés : ponts, autoroutes, lignes ferroviaires... L'extension de l'aéroport, avec un nouveau terminal d'une capacité de 1 000 passagers par heure, est estimée à elle seule à 228 millions d'euros. L'agrandissement et la modernisation du port devraient être achevés d'ici 2015, alors que les exportations russes vers la Chine pourraient pratiquement tripler d'ici 2021, d'après une étude de PricewaterhouseCoopers.
Un casino géant pour concurrencer Macau
Le point d'orgue du projet, c'est le divertissement : un complexe de 16 hôtels, des casinos, une marina pour les yachts de luxe, une piste de ski, un centre commercial, des bureaux et une station balnéaire.
A l'horizon 2022, 620 hectares seront aménagés à 50 km au nord de Vladivostok dans la baie d'Ussuriysky. La compagnie publique Nash Dom Primorye, qui a initié le projet, cherche des investisseurs pour un total de 1,76 milliard de dollars. Objectif : concurrencer Macau et Singapour, les fers de lance du jeu an Asie. Selon l'institut spécialisé Gaming Market Advisors, le projet de Vladivostok pourrait engendrer entre 2 et 7 milliards de dollars de revenus par an une fois achevé.
La ville semble déjà avoir conquis les Japonais. En septembre 2012, le Premier ministre Yoshihiko Noda est venu en personne signer un contrat avec Vladimir Poutine pour un projet de terminal de gaz naturel liquéfié entre l'entreprise nippone Itochu et Gazprom. Mazda a également choisi la ville russe pour sa première ligne d'assemblage hors du Japon et Hyundai y a aussi installé une usine.
Côté chinois, l'enthousiasme est moins perceptible. Ces derniers semblent plus intéressés par les ressources énergétiques de la Russie que par les casinos et les patinoires.