Repenser l'offre au travail face aux différentes générations
Arrivée à la cinquantaine, la durée de notre emploi s'estime sur au moins 14 ans. En moyenne, de 25 à 34 ans un salarié reste 3 ans et demi en poste.
Avec l'allongement de l'âge de la retraite, les entreprises vont devoir repenser la place des seniors et se réorganiser pour lutter contre les préjugés envers les plus de 50 ans. Ainsi, elles vont devoir assurer à ces profils l’acquisition en continu de compétences et leur ouvrir les portes vers une seconde vie professionnelle, un nouveau positionnement qui met en avant l’expérience et les soft skills. Ce choix d’une stratégie intergénérationnelle bénéficie autant aux seniors qu’à l’entreprise.
Si l’inquiétude des seniors à pouvoir atteindre l’âge de la retraite ne date pas de la réforme, celle-ci s'accroît avec son report à 64 ans. Par peur de manquer de ressources physiques et/ou psychologiques pour tenir deux ans de plus ou d’être remerciés par leurs employeurs avant d’atteindre l’âge de la retraite, les seniors sont aujourd'hui de plus en plus anxieux. Selon une enquête du Credoc, 68% des personnes interrogées craignent de ne pas être suffisamment en bonne santé pour atteindre l’âge légal, 72% des ouvriers et 62% des cadres redoutant de ne pouvoir poursuivre leur carrière jusqu’à son terme. Des craintes justifiées, puisqu’en 2022 plus de la moitié de la population française était en dehors de l’emploi à 60 ans.
Or, le marché du travail souffre d'une pénurie de talents. Transport, logistique, éducation, santé, restauration, commerce, banque, BTP, industrie alimentaire… tous les secteurs sont concernés. Selon l’étude s'intéressant à "L'état d'esprit des dirigeants pour 2023" d'OpinionWay, 60% des DRH disent avoir comme principale préoccupation de fidéliser leurs collaborateurs et 40% de capter de nouveaux talents. Dans ce contexte, les DRH ont donc tout intérêt à miser sur les seniors. Mais comment peuvent-elles valoriser des profils qui, depuis plus de trente ans, sont mis au rebut à la cinquantaine passée ?
Redorer l’image des seniors
Premier point : lutter contre les préjugés de type, "fatigués les seniors n’aspirent qu’à partir à la retraite", et "ils sont inadaptés au monde de la tech". Or, non seulement ils font souvent preuve d’un fort volontarisme pour s’adapter aux nouvelles technologies, mais ils savent aussi résister à des rythmes professionnels soutenus.
Par ailleurs, depuis des années, les entreprises leur renvoient une image dépréciée et les incitent à quitter leur emploi avant l’âge légal. Mais si l’âge de la retraite et les conditions de chômage leur permettaient jusqu’à présent de faire la jonction entre la période d’inactivité professionnelle et la retraite, les nouvelles conditions de chômage rebattent les cartes. Rien de surprenant donc à ce qu’ils voient avec angoisse la nouvelle réforme des retraites.
L’avantage des seniors : les soft skills
Deuxième point : miser sur l'expérience. Outre les compétences techniques, les soft skills sont essentielles aux performances des entreprises. Diplomatie, négociation, anticipation des problèmes et capacité à les résoudre, gestion des émotions, ou encore développement d’un esprit critique sont autant de qualités qui se forgent avec l’expérience et donc… avec l’âge. Parier sur les seniors et les accompagner via des programmes spécialement conçus pour eux est une stratégie gagnante. Formation, coaching, reverse mentoring, ces programmes destinés à acquérir de nouvelles compétences ont pour but de maintenir leur employabilité. Cette démarche doit être complétée d’une personnalisation du parcours professionnel prenant en compte le parcours passé, l’exposition au stress ou la pénibilité du métier. Objectif : donner aux salariés l’opportunité et l’envie de se projeter dans une deuxième partie de carrière. Une approche qui a des bénéfices pour l’entreprise, car, à contrario d’un trentenaire, un quinquagénaire ne quitte pas son employeur une fois les compétences acquises.
Fin de la stigmatisation
Enfin, la sémantique et la représentation sont très importantes. Plutôt que le terme "maintien en emploi des seniors" utilisé par le gouvernement et les entreprises, je propose "valorisation des plus de 50 ans". Une terminologie plus positive, moins stigmatisante. Il est temps de mettre en valeur les profils expérimentés dans l’entreprise, mais aussi de les porter à prendre la parole dans les campagnes de communication interne. On se projette quand on se reconnaît !
Face aux difficultés de recrutement et de rétention des jeunes collaborateurs, les seniors représentent un véritable gisement de talents. Opter pour une stratégie intergénérationnelle accroît la performance des entreprises.