Fin des cookies tiers : le symbole d'un Internet en mutation
Annoncée par Google en 2020, la suppression progressive des cookies tiers symbolise la préoccupation toujours plus importante que représente la confidentialité des données pour les usagers.
Il y a tout juste 30 ans, Lou Montulli et John Giannandrea, deux programmeurs de l’entreprise informatique Netscape, développent une solution qui stocke un « état » dans un objet, pour garder une trace de la navigation des internautes. Les cookies étaient nés. Véritables marqueurs, ces cookies permettaient au serveur de transmettre un fichier texte au client avant que ce fichier soit renvoyé à chaque requête de l’utilisateur. Ainsi, Netscape pouvait identifier les utilisateurs du site web et avoir une indication de leur panier au niveau du serveur.
L’essor des cookies tiers
À cette période où les sites web en sont encore à leurs balbutiements et les utilisateurs peu nombreux, les cookies sont introduits sans en informer les utilisateurs, sans notification de dépôt. Dès leur apparition, les cookies connaissent un développement rapide et se multiplient rapidement sur de nombreux sites web. S’ils sont déposés par le site web visité par l’internaute, les cookies peuvent aussi l’être par des sites tiers, souvent opérateurs partenaires du site natif, dans un objectif publicitaire notamment : ce sont les cookies tiers. Les informations collectées ne concernent ainsi plus uniquement le site visité, et se pose alors un enjeu de protection de la vie privée. En 1996, l'IETF (Internet Engineering Task Force) est la première organisation à recommander que tous les navigateurs bloquent par défaut les sites tiers.
Une réglementation progressive
Depuis cette première tentative de régulation, les initiatives des pouvoirs publics pour limiter le développement d’une industrie dépendante de l’utilisation des cookies tiers et peu respectueuse de la vie privée des internautes se sont multipliées. En 2002, l’Union européenne adopte une première législation exigeant le consentement de l'utilisateur pour le placement de cookies sur le web, sans grand succès. En 2018, entre en vigueur le RGPD (Règlement général de la protection des données) qui consacre les données collectées par les cookies comme des données à caractère personnelles et renforce ainsi la notion de consentement à la collecte et à l’utilisation des données personnelles.
Face au désir de transparence et de confidentialité des consommateurs, les moteurs de recherche se sont progressivement adaptés, à l’instar de Safari et Firefox, annonçant une limite dans le traçage de certains navigateurs et acteurs publicitaires. En 2020, Google, large leader du marché, annonce à son tour la suppression progressive des cookies tiers sur Chrome, afin d’être conforme à la loi, obligeant ainsi les entreprises à réfléchir à des alternatives : Privacy Sandbox de Google, le « fingerprinting » ou encore le développement de leur propre API.
La confiance comme moteur de la relation client
Alors que les cookies tiers seront a priori définitivement abandonnés lors du second semestre 2024 sur Chrome, 81 % des marketeurs français admettent encore en utiliser dans le cadre de leur activité. Mais l’ensemble de l’écosystème n’a d’autre choix que d’envisager un futur sans cookie, de tester et de mettre en œuvre rapidement les solutions alternatives qui n’impacteront pas (trop) leurs performances. Bien plus qu’une nécessité, on peut aussi voir la transition post cookie tiers comme une réelle opportunité de repenser sa stratégie marketing et sa vision de la relation client.
Au fil du temps, la prise de conscience des consommateurs sur la valeur de leurs données et la façon dont celles-ci étaient monétisées ont altéré leur confiance envers les marques. Afin de regagner cette confiance, les entreprises doivent miser sur les « first party data », ces données de première main directement partagées par les consommateurs, avec leur consentement. Précises et qualitatives, ces données permettent aux marketeurs de maintenir une bonne connaissance des clients afin de leur proposer une expérience personnalisée tout en préservant une relation de confiance grâce à un usage contrôlé des données.
La fin des cookies tiers marque une étape importante pour permettre aux entreprises de se reconnecter avec leurs clients. Outils révolutionnaires à la base, les cookies se sont au fil du temps transformés en objet intrusif pour les consommateurs, davantage conscients des risques liés à la confidentialité de leurs données sur le web. Pour répondre à cette préoccupation, les marketeurs doivent revenir au premier usage des cookies il y a 30 ans et exploiter les first party data, plus respectueuses de la vie privée, afin de maintenir une expérience cohérente. En utilisant les bons outils de collecte et d’analyse de données tels qu’un CRM intégré avec des outils de marketing, de vente et de service, les entreprises pourront continuer à miser sur la personnalisation de l’expérience client tout en revenant à plus de transparence et de simplicité, redevenues valeurs fondamentales de la relation client.